Le Corbusier appartient enfin au Patrimoine de l’humanité

Le complexe du Capitole, dans la ville indienne de Chandigarh, fait partie de l’ensemble des dix-sept sites réalisés par Le Corbusier qui témoignent de l’invention d’un nouveau langage architectural en rupture avec le passé, selon l’UNESCO.
Photo: Stéphane de Sakutin Agence France-Presse Le complexe du Capitole, dans la ville indienne de Chandigarh, fait partie de l’ensemble des dix-sept sites réalisés par Le Corbusier qui témoignent de l’invention d’un nouveau langage architectural en rupture avec le passé, selon l’UNESCO.

Après avoir essuyé deux échecs, en 2009 et 2011, l’oeuvre architecturale de Charles-Édouard Jeanneret, dit Le Corbusier (1887-1965), appartient désormais au Patrimoine de l’humanité. Ainsi en a décidé, dimanche 17 juillet, le comité du Patrimoine mondial de l’UNESCO, qui tenait sa 40e session à Istanbul (Turquie). Cette « contribution exceptionnelle au Mouvement moderne », telle que formulée par les défenseurs du projet de classement, couvre dix-sept sites qui sont répartis dans sept pays : Allemagne, Argentine, Belgique, France, Inde, Japon et Suisse.

Choisis dans l’oeuvre de Le Corbusier, les dix-sept sites qui composent ce bien en série, répartis dans sept pays, témoignent de l’invention d’un nouveau langage architectural en rupture avec le passé, a expliqué l’UNESCO dans un communiqué. Ils ont été réalisés sur un demi-siècle, tout au long de ce que Le Corbusier a nommé une « recherche patiente ».

L’ensemble, à vocation transnationale, comprend, dans l’ordre chronologique : les maisons La Roche et Jeanneret (1923) à Paris, une villa au bord du lac Léman (1923) à Corseaux (Suisse), la Cité Frugès (1924) à Pessac (Gironde), la maison Guiette (1926) à Anvers (Belgique), les maisons de la Weissenhof-Siedlung (1927) à Stuttgart (Allemagne), la villa Savoye et la loge du jardinier (1928) à Poissy (Yvelines), l’immeuble Clarté (1930) à Genève, l’immeuble locatif de la porte Molitor (1931) à Boulogne-Billancourt (Haut-de-Seine), l’Unité d’habitation (1945), dite « cité radieuse », à Marseille (Bouches-du-Rhône), la Manufacture (1946) à Saint-Dié-des-Vosges (Lorraine), la maison du docteur Curutchet (1949) à La Plata (Argentine), la chapelle Notre-Dame-du-Haut (1950) à Ronchamp (Haute-Saône), le Cabanon de Le Corbusier (1951) à Roquebrune-Cap-Martin (Alpes-Maritimes), le complexe du Capitole (1952) à Chandigarh (Inde), le couvent Sainte-Marie-de-la-Tourette (1953) à Eveux (Rhône), le Musée national des beaux-arts de l’Occident (1955) à Taito-Ku (Japon) et la Maison de la culture (1953) à Firminy (Loire).

« Génie créateur humain »

La 40e session de l’UNESCO a toutefois été bousculée par l’actualité en Turquie. Les membres des commissions ainsi que le public présent lors de cette session se sont trouvés à toute proximité des zones d’affrontements. « Les travaux ont d’abord été suspendus le vendredi, puis très allégés le lendemain, témoigne Benoît Cornu, président de l’Association des sites Le Corbusier qui porte la candidature aux côtés de la Fondation Le Corbusier et du ministère de la Culture. Tout a dû se faire de manière très précipitée. »

La démarche portée par la France a trouvé un écho très favorable auprès de Khalil Karam, l’expert du Liban au siège de l’UNESCO à Paris, récemment élu au bureau exécutif mondial de l’organisation internationale. Le diplomate, « avec beaucoup d’aplomb et une grande connaissance du dossier », selon M. Cornu, a soumis deux amendements. Le premier afin que l’oeuvre de Le Corbusier témoigne du « génie créateur humain », critère le plus valorisant dans l’esprit de l’UNESCO ; le second afin que soient supprimés les paragraphes susceptibles de dévaluer l’oeuvre de l’architecte.

Le Conseil international des monuments et des sites (ICOMOS), chargé d’expertiser les dossiers, avait déploré, dans ses comptes rendus, que la construction du stade Jean-Bouin, réalisé par l’architecte Rudy Ricciotti, en vis-à-vis direct avec l’immeuble de la porte Molitor, ne nuise à l’intégrité de ce dernier. Il en allait de même pour l’intégrité de la colline où ont été implantés les aménagements de l’Italien Renzo Piano au pied de Notre-Dame-du-Haut à Ronchamp. Khalil Kharam a considéré que ces réserves « n’avaient pas lieu d’être », a souligné Benoît Cornu.

La 40e session du Comité du Patrimoine mondial de l’UNESCO, écourtée en raison de l’actualité, doit reprendre à Paris au mois de septembre. Parmi les demandes qui seront au programme figure l’autre « candidature » française : la chaîne des Puys et la faille de Limagne (Puy-de-Dôme). À ce jour, 21 nouveaux sites ont été inscrits sur la liste de l’UNESCO (12 sites culturels, 6 naturels et 3 mixtes), ce qui porte à 1052 le nombre total de sites inscrits, répartis dans 165 pays.

À voir en vidéo