Des objets qui plongent dans l'histoire de l'Inde

Maang Tikka (de la province Frontière Nord-Ouest [Pakistan] à Delhi [Inde]), impression jet d’encre sur papier, 2013-2016
Photo: © Aanchal Malhotra Maang Tikka (de la province Frontière Nord-Ouest [Pakistan] à Delhi [Inde]), impression jet d’encre sur papier, 2013-2016

Lorsqu’elle a quitté son Pakistan natal pour l’Inde, au soir de la partition du pays en 1947, l’arrière-grand-mère de Aanchal Malhotra avait apporté avec elle un verre, pour pouvoir récolter l’eau des rivières et donner à boire à ses enfants, et une parure de tête que sa mère avait portée lors de son mariage à l’âge de 12 ans, en 1907.

Cet objet est l’un de ceux que Aanchal Malhotra présente dans le cadre de l’exposition Trouvés, à l’affiche à la Maison de la culture Frontenac jusqu’au 4 juin prochain. Originaire de New Delhi, ayant étudié à l’Université Concordia, Aanchal Malhotra se penche sur cet épisode très douloureux que fut la partition de l’Inde, après le retrait des colonisateurs britanniques.

« Cet événement est l’un des plus grands mouvements migratoires de l’histoire, dit-elle en entrevue. Il y a eu 12 millions de personnes déplacées et un million de morts. Plusieurs personnes ont perdu leur foyer, ont perdu leurs familles. Il y a eu des émeutes. Alors si vous étiez capables d’apporter quelque chose de chez vous, ne serait-ce qu’un morceau de vaisselle ou un ustensile, cela devenait un symbole très fort. »

Retracer la mémoire perdue

 

C’est donc à travers les objets qui ont survécu à la partition de l’Inde qu’Aanchal Malhotra a décidé de retracer la mémoire perdue de ces années. Elle a rencontré autant des hindous, qui, comme ses quatre grands-parents, ont dû quitter définitivement le Pakistan pour l’Inde, que des musulmans qui ont dû abandonner l’Inde pour le Pakistan.

« Le Pakistan est devenu un pays musulman », rappelle-t-elle. Auparavant, il y avait eu des tensions entre les communautés hindoues, sikhes et musulmanes de cette portion du nord de l’Inde. « Mais jamais au point de la folie meurtrière qu’a entraînée la partition. Avant, les gens ne se tuaient pas uniquement parce qu’ils étaient hindous, sikhs, ou musulmans. » La partition avait été effectuée sur une base religieuse.

« Personne n’a jamais vraiment cru que nous ne pourrions jamais revenir à Rawalpindi, raconte l’une des personnes interrogées par Aanchal Malhotra, dans le cadre de ce projet. […] Nous avions notre ville, notre voisinage, nous sommes nés et avons été élevés sur cette terre. Et même si elle avait un nouveau nom maintenant, nous avons juste supposé que nous allions vivre au Pakistan. » Il fallait, dit cette personne, laisser la violence se calmer avant de retourner sur les lieux. « Nous avions vécu parmi des hindous, des musulmans, des sikhs, sans jamais savoir la différence. Alors, pourquoi maintenant ? Le retour était la seule chose qui avait un sens pour nous. » Mais la violence ne s’est jamais suffisamment « calmée » pour leur permettre d’accomplir ce rêve.

Le travail d’Aanchal Malhotra a déjà été présenté à New Delhi, dans une exposition annonciatrice de l’ouverture du tout nouveau Musée de la Partition, prévue pour l’an prochain. « Je suis membre du conseil d’administration de ce musée », dit-elle.

Photos sauvées

 

Aux côtés du travail d’Aanchal Malhotra, Margret Nielsen présente des photos qu’elle a sauvées du recyclage, et qui proviennent de deux générations de photographes qui avaient un studio à Bhaktapur, de 1940 à 1990. Le père, Kedar Banepali, a été le premier photographe à avoir un studio à Bhaktapur.

« C’est très spécial, parce qu’il ne faisait pas que du studio. Il allait dans la rue et photographiait des scènes de la vie quotidienne », dit Margret Nielsen.

Ces photos avaient été faites en noir et blanc, sur épreuve argentique, et il est courant au Népal de tenter de tirer un peu d’argent de la vente du métal contenu dans les négatifs. « C’est un matériau qui permet de découvrir la vie quotidienne dans la vallée de Katmandou, notamment dans le groupe ethnique des Nevwar », poursuit Margret Nielsen.

Les photos témoignent en effet d’une série de rituels accomplis par les Nevwar à différents moments de leur vie, à la puberté par exemple, ou dans les années qui précèdent la mort.

L’exposition Trouvés, montée par le commissaire Kakim Goh, se déploie dans le cadre du Festival Accès Asie, qui prend l’affiche du 5 au 29 mai à Montréal. Durant la première semaine, on pourra assister à un récital en l’honneur du compositeur japonais Toru Takemitsu. La seconde semaine débutera avec une soirée de cinéma asiatique muet du début du XXe siècle, avec musique en direct, et se poursuivra avec divers événements, de danse, mais aussi de musique et de vidéo. Le festival tiendra ensuite sa compétition de danse du Moyen-Orient, avec, entre autres, des danseurs des Philippines, de l’Iran, du Japon et de l’Inde.

Trouvés

Exposition présentée à la Maison de la culture Frontenac dans le cadre du Festival Accès Asie, du 5 au 29 mai

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