Le financement des arts en (r)évolution

Alors que les annulations théâtrales et le boycottage des scènes québécoises du chorégraphe Dave St-Pierre relancent le débat sur le sous-financement des arts, deux rapports récents proposent de revoir les structures de soutien artistique au pays.
Dave St-Pierre clamait récemment sur sa page Facebook qu’il fallait « revoir complètement les structures des conseils des arts », déplorant le fait qu’il ne « “fitte” pas dans les cases » et refusant d’avoir à créer des spectacles « en sortant de l’argent de ses poches ».
Loin des études chiffrées, les deux rapports de la Fondation Metcalf, relayés par la firme Hill Strategies Recherche Inc., prennent la forme d’exposés argumentaires pour revoir le système de financement public et la gestion des arts. Le premier, Chorégraphier notre futur : stratégies pour soutenir les pratiques artistiques, est signé de l’artiste et chercheuse Shannon Litzenberger.
Dans ce rapport, Litzenberger recommande de réévaluer l’approche disciplinaire du financement public, car il tend à favoriser les silos, et le soutien qui en résulte peut s’avérer incohérent, imprévisible, surtout dans les programmes d’aide au projet. « Alors qu’un nombre grandissant de créateurs brouillent les frontières entre les formes artistiques, il faut se demander si notre approche basée sur les disciplines n’est pas en train d’entraver notre capacité à explorer des pratiques artistiques innovantes. »
Le rapport remet même en question le modèle pourtant révéré ailleurs du financement « à un bras de distance » (arms length) basé sur l’évaluation par des comités de pairs. L’auteure observe que les modèles anglais, américain et australien ont tous favorisé des cadres de financement axés sur les interrelations à l’oeuvre dans l’écosystème artistique (recherche et développement, création, production, diffusion, développement de marché) plutôt que sur une série de disciplines artistiques.
La transformation proposée du modèle de financement passe notamment par une diversification des moyens de soutien aux artistes individuels à des étapes cruciales de leur carrière, y compris « des investissements périodiques sous formes de bourses, de prix, de subventions accélératrices, de congés sabbatiques ou de fonds pour le développement des capacités ». Le rapport recommande aussi de prioriser le soutien des plateformes administratives partagées et de nouveaux modèles fonctionnels dans les arts.
Pépinières
L’autre rapport, Plateformes partagées et pépinières de bienfaisance, donne des éléments clés qui assureraient aux plateformes de ressources communes un « impact significatif sur l’amélioration de la santé du secteur des arts ». Ces « pépinières de bienfaisance », que Hill Strategies traduit de l’anglais « charitable venture organisations », ne feraient pas qu’offrir certains services (administratifs, de développement de marché, etc.) à plusieurs artistes ou organismes, comme il en existe déjà. La pépinière, qui abrite différents organismes ou artistes, « est responsable de tout ». L’idée est de partir des modèles déjà développés par les collectifs et autres organismes de services partagés.