Arthur, roi de la vacuité et de la blague facile
Il y a des rendez-vous auxquels on se présente parfois à reculons. Le spectacle de l'ex-animateur de télé devenu humoriste, Arthur, présenté dans le cadre du festival Juste pour rire, en fait partie.
C'est que les préjugés, en plus d'être crasses, peuvent être très tenaces: grande gueule de la télé française, le bonhomme a fait carrière en effet en exhibant avec ostentation une certaine vacuité à la radio puis sur les ondes de TF1, le TVA des cousins éloignés.Ambitieux à l'ambition démesurée, sa quête de reconnaissance l'a rendu plein de lui-même, ainsi que riche et célèbre, deux caractères qui n'ont rien de honteux. On souligne.
Il fréquente la mannequin Estelle Lefébure — l'ex-blonde du fils de Johnny Halliday —, fait régulièrement la une des journaux à potins, est devenu un influent producteur dans le monde de la télé et, depuis quelques années, «se la joue» humoriste, comme disent les Français, une nouvelle carrière qu'il souhaite construire, répète-t-il ad nauseam sur tous les plateaux de télé où, forcément, il est facilement invité et où il démontre chaque fois sans surprise une superficialité suprême.
Derrière l'affiche qui annonce donc Arthur en vrai — c'est le titre du spectacle —, le porteur d'opinions tranchées et préconçues a donc une bonne idée de ce qui l'attend. Et malheureusement, en s'installant face à la scène de la Maison Théâtre où l'aspirant clown sévit jusqu'au 17 juillet prochain, il ne trouvera rien d'autre.
Un doute? En plus d'une heure trente, avec le bagou, le sourire charmeur et la gueule de gendre idéal qui ont fait sa renommée, le producteur en quête d'une nouvelle orientation livre en effet un spectacle qui sent fortement le déjà-vu avec sa série de blagues lourdement éculées sur le thème de la jalousie, de la vie quotidienne à deux, de la différence entre les hommes et les femmes...
Morceau choisi: Arthur s'adresse à une fille du premier rang et lui demande de nommer trois monnaies étrangères, trois moyens de contraception, puis trois poèmes de Baudelaire. La chute? Devant le néant qu'inspire à la demoiselle la poésie de Charles, il lance: «Y'a que le sexe et l'argent qui vous intéressent, vous, les femmes!» À cet endroit de la critique, un commentaire serait forcément de trop!
Classique, douloureusement consensuel, sans surprise, avec un texte usé à souhait, Arthur, qui donne l'impression sur son affiche de vouloir servir de l'authentique aux Montréalais, n'a finalement rien d'autre à vendre qu'un spectacle sans relief, sans envergure, avec une trame évidente et parfois gênante ou grossière, qui donne très vite l'impression d'être face à un produit générique savamment concocté. Ou d'une synthèse ordinaire et sans intérêt des blagues de cours de récréation, d'histoires drôles répandues dans Internet, de jokes de taverne qui circulent depuis des années.
La «ménagère de moins de 50 ans», un concept très franco-français, mais aussi le public cible depuis des lunes de cet animateur «qui s'la pète», pourrait donc rester sur sa faim. Et ce, malgré une amorce avec un dessin animé narcissique mais sympathique, un clin d'oeil amusant à sa femme, mais aussi quelques zones d'émotion — sur le thème de son fils et de ses parents — plantées dans ce produit culturel qui ne suffisent pas, cependant, à faire sonner l'ensemble autrement que faux. Un autre titre s'imposerait donc: Arthur en vrai... esbroufeur. Pourquoi pas?