Le Canada fait reconnaître les falaises fossilifères Joggins - La Liste du patrimoine mondial respecte mieux l'équilibre géopolitique

La Liste du patrimoine mondial, longtemps critiquée pour son occidentalo-centrisme, continue lentement mais sûrement sa mondialisation et son rééquilibrage géopolitique en faveur des régions du Sud.
À mi-parcours de la réunion du Comité du patrimoine mondial de l'UNESCO, à Québec, douze des dix-neuf nouvelles inscriptions culturelles ne proviennent pas de l'Europe ou de l'Amérique du Nord. On y retrouve notamment des sites situés en Arabie saoudite, à Cuba, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, au Cambodge, en Chine, en Malaisie et même dans la République de Vanuatu, un petit État de Mélanésie qui apparaît pour la première fois dans la liste.La répartition plus équitable des nominations fait officiellement partie des larges objectifs du Comité du patrimoine mondial depuis 2002. La «décision de Cairn», du nom de la ville australienne où elle a été adoptée, répondait directement aux critiques trouvant la liste trop occidentale et surtout trop eurocentriste: 287 des 754 sites inscrits entre 1972 et 2003 se situent en Europe. À elle seule, l'Espagne compte une quarantaine d'inscriptions et l'Inde, 26 seulement, l'Irak deux et l'Afrique au grand complet moins de 10 % de toutes les mentions.
À Québec, le comité de 21 membres, présidé par la Québécoise Christina Cameron, examinera un total de 43 sites culturels et naturels d'ici la fin de la semaine. Les experts ont déjà décidé de 27 nouvelles inscriptions depuis le début des travaux le 3 juillet. Le saint des saints des sites culturels ou naturels jugés de «valeur universelle exceptionnelle» comprend maintenant 876 lieux, comme les îles Galápagos en Équateur, l'Acropole en Grèce et les parcs des montagnes Rocheuses canadiennes, intronisés au cours des réunions précédentes.
Les huit nouvelles inscriptions naturelles s'avèrent plus équilibrées géopolitiquement, avec autant de sites du Nord que du Sud. Le Canada fait partie du lot puisque les experts ont ajouté par recommandation unanime l'inscription des falaises fossilifères de Joggins, en Nouvelle-Écosse. Les pays signataires de la convention n'ont droit qu'à une demande d'inscription par année. Le site de l'est du Canada a été désigné comme «candidat» de 2008 à la suite de l'établissement d'une liste indicative nationale sur laquelle figurent une dizaine de sites pouvant prétendre au statut universel. On retrouve maintenant 15 sites du patrimoine mondial au Canada, dont la vieille ville de Québec, hôtesse de la réunion annuelle.
Joggins a reçu le surnom de «Galápagos du carbonifère» à titre de site de référence mondiale de l'âge du charbon. Le grand affleurement de roc renferme le dépôt de fossiles connu le plus complet et le mieux conservé de la vie terrestre à l'âge du charbon. Il comprend des corps d'arbres faisant plus de six mètres de haut, une grande diversité d'invertébrés, de poissons et d'amphibiens ainsi que les vestiges des plus anciens reptiles du monde.
Le site s'étend sur 15 kilomètres de falaises maritimes gorgées de fossiles, faisant souvent plus de 30 mètres de haut, le long de la côte de la baie de Fundy. Un nouveau centre d'interprétation y a été inauguré en avril, au coût de neuf millions de dollars. Des experts du comité avaient passé six jours sur le site l'automne dernier pour évaluer la valeur des précieuses falaises.
Un thème religieux et culturel a dominé la journée de travaux hier. Les experts ont reconnu les lieux saints baha'is à Haïfa et en Galilée occidentale (Israël), 26 édifices et monuments au total, associés à la foi baha'ie. L'Albanie a pour sa part fait inscrire les centres historiques de Berat et de Gjorokastra, une importante zone de croisement de différentes traditions. Le site du Vanuatu, le domaine du chef Roi Mata, un lieu funéraire collectif depuis 1600 ans, se place aussi sous le thème informel de la journée.