Du papier glacé au grand écran

Le musicien Jacob Obus et sa muse sont nés en 2002 dans Mars et Avril, un photo-roman hybride aux antipodes du roman de gare ou à l'eau de rose. Les voilà qui réapparaissent ces jours-ci dans Mars et Avril tome II: À la poursuite du fantasme, un parcours qui pourrait les conduire jusqu'au grand écran, révèle leur idéateur, Martin Villeneuve, qui a l'appui du cinéaste et homme de théâtre Robert Lepage.
En fait, Martin Villeneuve est présentement en train de mettre la dernière main au scénario qui réunira les deux tomes en prévision d'un tournage prévu pour le début de l'année 2008. «On veut tester de nouvelles technologies, comme on l'a fait avec le livre. On va tourner le film à très petit budget, mais en tirant parti de ce qui nous est offert comme outils; je pense par exemple à la mini-DV, avec un tournage qui tirerait parti de la post-production.»Conquis par le rapprochement heureux des moyens d'expression dans Mars et Avril, Robert Lepage a longtemps caressé le projet de produire lui-même les deux tomes. Mais c'était avant qu'il ne ferme sa compagnie de production cinématographique Ex aequo, en juillet dernier. Qu'à cela ne tienne, il sera quand même de l'aventure, assure l'auteur et directeur artistique. «Le film ne sera pas produit par Ex aequo, mais il revivra sous une autre forme avec d'autres partenaires, tout en gardant Robert Lepage impliqué.»
Il faut dire que le créateur bien connu est la pierre angulaire du second tome qui était lancé hier, à l'Usine C à Montréal. C'est lui qui prête ses traits à l'intrigant Eugène Spaak qui commande la machine à voyager dans l'inconscient collectif. «Le personnage de Spaak amène une autre couleur et une tout autre énergie, confirme l'auteur. Ironiquement, Robert devait être du premier tome, mais il n'avait pu se libérer et le personnage n'avait été que brièvement cité.»
Cette fois, Robert Lepage tient le haut de l'affiche aux côtés de Jacques Languirand, Marie-Josée Croze et Paul Ahmarani, qui se glissent à nouveau dans la peau du musicien Jacob Obus, de sa muse, Avril et de son ami Arthur. «Eugène fait le pont entre la génération d'Arthur et celle de Jacob. C'est aussi lui qui fait le lien entre les notions musicales et scientifiques», précise Martin Villeneuve.
Si le premier tome s'attachait davantage au désir, le second s'articule cette fois autour du rêve et fait la part belle aux questionnements philosophiques et métaphysiques. En fait, si le tome II est le prolongement d'une technique alliant les codes de la BD et du récit de science-fiction, l'histoire nous emmène complètement ailleurs, non sans visiter quelques théories scientifiques, dont celles de Kepler.
Plus graphique et plus abouti que le premier tome, À la poursuite du Fantasme est davantage une oeuvre collective, contrairement au premier tome qui avait été porté à bout de bras par Martin Villeneuve. Cette fois, le photographe Yanick Macdonald a pu lancer le dialogue, et cela se sent au fil des pages qui ont gagné en inventivité. L'approche graphique a aussi fait peau neuve sous la baguette de la designer graphique Roxana Zegan.
Le fruit de cet intéressant travail d'hybridation fera l'objet d'une exposition à l'Usine C jusqu'au 10 novembre. L'exposition, qui s'attarde au processus créateur qui a conduit à la rédaction du tome II, sera reprise à la Librairie Monet au printemps 2007.